« 3 questions à… » est une rubrique qui permet à nos lecteurs de découvrir un artiste à travers de brèves confessions sur son rapport au voyage et à la musique.
Impressionnant pari que de jouer en solo dans le vaste auditorium de la Seine musicale, nouveau lieu culturel situé sur l’île Seguin à Boulogne. C’est pourtant celui qu’a relevé le jeune Tigran Hamasyan, pianiste d’exception dont le corps suit les nuances de son instrument, pénétrant imperceptiblement l’âme du public avec une mélodie « New Baroque » ou un « Someday my prince will come » aux accents angoissants…
Ce 14 octobre, peu avant le concert, il nous a fait part de ses souvenirs et de ses élans du moment. Coup de projecteur sur cet enfant prodige du jazz.
« Mon oncle a été un vrai guide dans ma vie de musicien »
Qui t’a le plus influencé musicalement durant ton parcours?
J’ai grandi à Gyumri, la deuxième plus grande ville d’Arménie, puis nous avons déménagé avec ma famille à Erevan, la capitale, où je suis resté jusqu’à mes 16 ans. Mon oncle est sans aucun doute la personne qui m’a le plus influencé musicalement. J’avais à peine 4 ans lorsqu’il m’a fait découvrir le jazz. Il m’a permis de trouver ma voie. Il écoutait Herbie Hancock, Miles Davis, des artistes soul comme Marvin Gaye, James Brown… il se nourrissait essentiellement de jazz et de funk. Mon professeur de musique, Vahag Hayrapetyan, a également été très important dans mon parcours, il m’a initié à l’improvisation. C’est un pianiste incroyable, il m’a enseigné les bases du bebop. C’est encore mon oncle qui m’avait parlé de lui, il a été un vrai guide dans ma vie de musicien. Mon père, quant à lui, était un grand fan de rock. Il collectionnait un tas de disques et dépensait parfois tout son salaire pour s’offrir le dernier album de Led Zeppelin. Donc j’ai grandi aux sons du rock, du jazz et de la soul.
Mes goûts se sont bien sûr élargis avec le temps. En ce moment par exemple, j’écoute en boucle un morceau troublant, « Lonely world » de Moses Sumney, un jeune artiste californien : une fusion pop vraiment intéressante. Et je réécoute sans m’en lasser l’album Now he sings, now he sobs de Chick Corea. J’en étais dingue, et le virus me reprend…
Si tu pouvais aller n’importe où, dans quel lieu rêverais-tu de jouer?
J’aimerais jouer dans la ville de Kars, actuellement en Turquie, c’est le lieu d’où viennent mes ancêtres. J’y ai été une fois mais j’ai joué dans un hôtel, il était impossible de se produire au conservatoire ou ailleurs. La prochaine fois je voudrais vraiment faire un concert dans un lieu de musique.
As-tu un lieu musical coup de cœur à faire découvrir à nos lecteurs?
Il y a un lieu à Paris que j’aime beaucoup : c’est la Péniche Anako. J’y ai vu de nombreuses cultures différentes se côtoyer, j’ai assisté à des concerts d’une grande qualité. Je sais qu’ils sont en difficulté et que la Ville de Paris veut récupérer l’endroit, et pour ma part j’espère vraiment qu’ils ne seront pas contraints d’arrêter leurs activités. C’est un lieu culturel qui doit continuer de promouvoir toutes ces musiques et d’offrir un espace d’expression aux jeunes talents.